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Domaine étranger L’infinie passion

octobre 2015 | Le Matricule des Anges n°167 | par Thierry Guinhut

Une épopée aux personnages hauts en couleur traverse l’Italie du XIXe siècle.

Les Folles espérances

Dans la « merde » ; c’est ainsi que s’ouvre ce vaste roman. Colombino, « le trimballe-merde », fait commerce de ce naturel engrais, non sans devenir amoureux de Vittorina qui voudrait bien l’épouser. Mais pour tous les personnages de cette fresque, il va falloir s’en sortir, sentimentalement, socialement, politiquement. Notre tourtereau ira jusqu’à Rome pour tenter de faire bénir par le Pape son union contrariée, quand le jeune « peintre désargenté », Lisander, veut quitter ses modestes habits pour faire fortune grâce à un nouvel art : la daguerréotypie. L’on suit également les malheureuses tribulations de Leda, incarcérée au couvent. Alors que, depuis le Brésil, revient un certain dom José, alias Garibaldi, qui va œuvrer et combattre au service de son idéal : l’unité italienne. On imagine que les récits alternés vont permettre à ces quatre destinées de se croiser, au sein d’un immense, immédiatement prenant, roman historique, plein d’actions, de passions et de verve…
Peu à peu, en une spirale de contrastes, souvenirs ou projections vers l’avenir, « émotions charnelles » de Garibaldi avec Aninha, « une femme qui se battait comme une héroïne », ou silence cloîtré de Leda, ambition d’orner l’Histoire avec une république nouvelle ou de participer aux mouvements artistiques et capitalistes, le quatuor de bras narratifs conflue en l’immense fleuve, indubitablement romantique, d’une fresque aux acteurs avides de vie.
Le pèlerin Colombino est un Candide picaresque en son voyage ; battu, emprisonné, peut-être est-il l’acteur le plus attachant. Leda, une fois échappée, devient, grâce à un « parcours social, scientifique, mais aussi philosophique », donc un roman d’éducation dans le roman, une curieuse espionne. Lisander, grâce au « pinceau naturel de la Chambre Optique », se fait entrepreneur érotomane, l’un des premiers à exploiter la photographie pornographique, quoiqu’il se pose bien des « questions d’esthétique philosophique ». Garibaldi, l’idéaliste, est néanmoins un réel tacticien sur le front de maints combats. Tous à leur façon, naïve ou sensuelle, sont amoureux, d’un disparu, d’une paire d’yeux « bovine », d’une prostituée, d’un héros… Car « le désir inspirait l’art et faisait valser le pognon ». Autour d’eux, parmi des dizaines de personnages secondaires et pittoresques, toute une société se déploie, paysans, bourgeois révolutionnaires, « Romantiques de Traviole  », entre Milan, Turin, Rome, Gênes, en un vaste chant d’amour italien, mais aussi entre la côte brésilienne et l’Angleterre. Le maelström des récits, qu’ils soient psychologiques ou réalistes, intimistes ou grandioses, du naufrage à l’insurrection, ne néglige ni les grandes idées nationalistes ni les « fesses pleines comme les deux moitiés d’un cœur  » et les « Inclinaisons Naturelles du Pénis »… Car l’écriture est tour à tour lyrique, rabelaisienne, ironique et didactique.
Nous avons deviné que le modèle avoué d’Alessandro Mari est le Dickens des Grandes espérances, bien déçues d’ailleurs ; Sir John, le mentor de Leda, en est fou : « populaire, mélodramatique à en vomir, mais quelles histoires, ma chère ! » Mais on pencherait tout autant pour le Manzoni des Fiancés ou Alexandre Dumas, entre roman historique et d’aventure. Pourtant on a la surprise d’apprendre qu’il commit une thèse sur Thomas Pynchon ; faut-il penser à ce dernier en traversant cette structure romanesque cumulative, erratique et mosaïquée ? L’encyclopédique roman de formation des personnages est conjointement celui du Risorgimento, un Guerre et Paix au cœur du XIXe siècle, et une reprise enjouée des procédés narratifs de ce même siècle, sublimant l’épopée de la botte italienne. Riche de bruits et de couleurs, d’idées et de passions, ce premier objet fictionnel d’un romancier, né en 1980, est, à l’instar d’un opéra de Verdi, un morceau de Maestro !
Thierry Guinhut

Les Folles espÉrances
D’Alessandro Mari
Traduit de l’italien par Anna Colao, Albin Michel, 990 pages, 27

L’infinie passion Par Thierry Guinhut
Le Matricule des Anges n°167 , octobre 2015.
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