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Jeunesse L’effet papillon

juin 2008 | Le Matricule des Anges n°94 | par Malika Person

Ulrich Hub met en scène trois pingouins en proie à des questionnements métaphysiques. Un roman désopilant, à la croisée des genres.

L' Arche part à 8 heures

Illustration(s) de Jörg Mühle
Editions Alice Jeunesse

Ce roman est un pavé dans la mare, un étrange objet littéraire : tout à la fois une fiction humoristique, un petit traité philosophique (dans une moindre proportion tout de même) et du théâtre. L’histoire, rocambolesque, parsemée d’illustrations au trait fin, léger, suit le fil rouge d’un récit emprunté à un épisode biblique, en l’occurrence le déluge et l’arche de Noé, fortement revisité. Des questions réputées sérieuses ou difficiles sont effleurées ou évoquées pêle-mêle au fil de la narration : l’existence de Dieu, le plaisir, le déplaisir, le désir, le bien et le mal, la punition, la culpabilité… au travers des interrogations de personnages attachants, aux contours imparfaits.
Soit trois oiseaux (des pingouins, précise le texte), trois énergumènes, deux grands et un plus petit, trois amis, trois personnalités bien distinctes et une vision bicolore et monotone du monde (le blanc de la banquise, le blanc et le noir de leur plumage). L’ennui les taraude (à l’horizon, ils ne voient rien venir, et d’ailleurs, ils n’attendent rien, si ce n’est qu’ils ont le désir que quelque chose se passe). Ils tentent de conjurer cet ennui par des insultes et des bagarres récurrentes. Chaque jour, la même scène se reproduit, invariablement.
Leur vie va cependant être bouleversée par l’apparition soudaine d’un animal léger, virevoltant au-dessus de leur tête, une petite tache de couleur jaune, un papillon, symbolisant, bien entendu, la métamorphose, mais aussi, une catastrophe à venir, ce que les pingouins sont loin de soupçonner.
Ici, la convergence entre le chaos et l’effet papillon (qui est une métaphore selon laquelle un battement d’aile de papillon pourrait provoquer une tornade) est totale. Un coup de théâtre va advenir, qui va modifier le cours de la narration et la portée du texte.
Lorsque l’un des pingouins, le plus petit, fait part de son irrépressible envie d’écraser l’insecte, ses deux comparses tentent de l’en empêcher en lui annonçant un « Tu ne tueras point ! » assez inattendu, arrivé là comme un cheveu sur la soupe, provoquant la stupeur des pingouins eux-mêmes. Le débat de fond qui s’engage est interrompu par l’arrivée d’une colombe venue leur annoncer l’imminence du déluge, après que le sort du papillon fut réglé, écrasé par mégarde (?) par le petit pingouin.
En s’emparant de manière incongrue de l’un des dix commandements dès le début de son histoire, Ulrich Hub y introduit d’emblée le concept de Dieu. « Mais c’est qui, Dieu ? » Personne ne sait quoi répondre exactement, sauf qu’il est « puissant » et qu’ « il est invisible. / C’est un gros défaut, dit le petit pingouin, déçu. Si Dieu est invisible, personne ne peut savoir s’il existe vraiment. » Dès lors, le texte se construit sur la base des questions existentielles et philosophiques que soulève l’aventure exceptionnelle que vivent désormais les personnages, une aventure similaire à celle de l’humanité, sans être tout à fait celle-ci, sans être tout à fait une autre.
L’Arche part à 8 heures est une réécriture d’une théorie du chaos propre à l’auteur, une appropriation d’un mythe des commencements (le déluge) où affleure la question des origines, de toutes les origines y compris celle de l’écriture, de la genèse de ce texte même. Le mélange des genres n’est pas ici qu’une question de style mais à l’instar de l’amour naissant entre le jeune pingouin et la colombe, une issue possible.
C’est dans ce rapport fertile de probabilité/improbabilité que semblent pouvoir advenir de l’inattendu, de l’humour, dans ce rapport de fiction/réalité où le texte d’Ulrich Hub prend sa source, qu’il prend de l’ampleur, inventant sa propre écriture. Le romancier-dramaturge s’est par ailleurs fortement inspiré du théâtre, détournant les didascalies en descriptions concises, multipliant des dialogues remarquablement travaillés dans leur clarté, en démontrant au passage son aisance dans l’expression de l’art de la dialectique.

L’Arche part
à 8 heures

Ulrich Hub
Traduit
de l’allemand
par Emmanuelle Sandron
Illustrations
de Jörg Mûhle
Alice jeunesse, « Les romans »
90 pages, 8

L’effet papillon Par Malika Person
Le Matricule des Anges n°94 , juin 2008.
LMDA papier n°94
6,50 
LMDA PDF n°94
4,00