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Les éructations du colon
Lmda N°252 Mathieu Belezi poursuit son exploration de la matière sombre de la colonisation française en Algérie. Tu vas nous faire un beau discours, Bobby / oui, j’allais le leur faire ce beau discours qu’ils attendaient tous, foutre dieu ! j’allais me le fatiguer le cerveau, me les creuser les méninges, me les chauffer les cordes vocales, me l’actionner la forge à poumons, foutre dieu ! je n’allais pas me gêner ! j’allais la leur raconter notre histoire au président de la République et à ses ministres,...
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Domaine étranger Invitation au Banquet Le Brésilien Bernardo Carvalho questionne notre rapport au monde d’avant et après-Covid. Un pied de nez métaphysique et malicieux. Enfanter aujourd’hui tient du défi, du pari hasardeux sur un avenir nébuleux. N’en déplaise à ce président aussi impérieux qu’impétueux, dont les formules martiales intiment à un réarmement reproductif. La fragilité climatique et environnementale de la planète, les guerres, l’avènement des extrêmes droites et de matamores illibéraux n’augurent rien de bon. Mais qu’en fut-il en période de Covid ? Au Brésil, le virus fit près de 700 000...
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Domaine français France western Sept ans après Les Cosmonautes ne font que passer, Elitza Gueorguieva publie dans la même veine autobiographique burlesque un second roman réussi. On l’avait laissée en Bulgarie, aux confins de l’enfance, et dans les remous de la transition démocratique post-soviétique. On la retrouve en France, où elle a atterri au début des années 2000 pour poursuivre des études et la liberté, et où elle découvre que « La République est une planète curieuse ». La narratrice d’Odyssée des filles de l’est est une petite fille presque devenue grande, qui continue de promener sur le monde son regard à la...
Chronique
En grande surface
En grande surface
par Pierre Mondot
I want Ubac
Au mois de novembre dernier, un sénateur issu du centre décomplexé verse en catimini quelques grammes d’ecstasy dans la coupe de champagne d’une amie députée avec l’espoir qu’elle se mélange les chambres. La manœuvre échoue et la dame porte plainte. Afin de justifier le geste de son client, l’avocat propose une circonstance atténuante : la veille des faits, son vieux chat venait de mourir. Presque la réponse d’Agnès à Arnolphe dans L’École des femmes. Pour le même effet : hilarité générale.
Le pays n’est pas prêt à considérer le deuil des animaux de compagnie. Le chien trépasse et la...
Le Matricule des Anges n°250
un auteur
Martin Rueff
Chronique
Traduction
Traduction
Arnaud Bikard *
Le Chevalier Paris et la Princesse Vienne d’Élia Lévita
Rien ne me destinait a priori à traduire un roman de chevalerie, et sans doute encore moins un roman de chevalerie yiddish. Arthur, Charlemagne, le merveilleux, les inimitiés et alliances des familles seigneuriales n’ont pas exercé de charme particulier sur mon enfance. On a bien dû me dire, avant l’âge adulte, que mes grands-parents maternels connaissaient le yiddish (bien que, ne les ayant jamais entendus parler que le français, il m’est arrivé d’en douter) mais cette langue, associée dans mon imaginaire au judaïsme orthodoxe, à la grisaille polonaise, aux disparus de la Seconde Guerre...
Le Matricule des Anges n°248
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Domaine étranger L'homme qui a entendu le tarsier Entre souvenirs et observations, les tribulations d’un naturaliste mexicain au gré de Rencontres avec des animaux extraordinaires. Depuis au moins les Grecs de l’Antiquité, sinon les compilateurs de tablettes cunéiformes mésopotamiennes, poètes, scientifiques et philosophes sont fascinés par les bêtes. Ainsi, par-delà les millénaires, le Mexicain Andrès Cota Hiriart est-il un successeur d’Aristote qui écrivit une Histoire des animaux en distinguant ceux qui ont du sang et ceux qui n’en ont pas. Notre écrivain et naturaliste choisit lui d’examiner les plus...
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Poésie Désenvenimer l'inacceptable À travers sursauts et scissures, dissonances et tâtonnements inquiets, la poésie d’André Frénaud (1907-1993) met en scène l’expérience ontologique. Une anthologie de ses poèmes longs nous donne l’occasion de la(re)découvrir. Moins répandue que celle d’un René Char ou d’un Henri Michaux, la poésie d’André Frénaud, né à Montceau-les-Mines, en 1907, ne se livre pas d’emblée. Pudique et rigoureusement syntaxée, elle est celle d’un grand mâcheur de mots qui fait entendre une vérité d’existence sous la vérité d’écriture. Entré tard en poésie, à 34 ans, retour de captivité, avec Les Rois mages, André Frénaud a une vision tragique de l’homme. Isolé au cœur de...
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Histoire littéraire Dissemblables mais complices Si tout semble séparer Maurice Chappaz, le « catholique païen », et Philippe Jaccottet, l’homme du doute à la rigueur protestante, leur correspondance montre qu’ils partageaient la même idée d’une poésie de la présence. Après avoir lu la correspondance (1942-1976) que Jaccottet échangea avec Gustave Roud (Gallimard, 2002, édition établie par José-Flore Tappy) on espérait découvrir celle qu’il échangea avec Chappaz. Un vœu aujourd’hui exaucé grâce à cette même José-Flore Tappy. Elle commence, cette correspondance, suite à une note de lecture élogieuse de Jaccottet à propos de Verdures de la nuit (1945), le deuxième recueil de Chappaz, son compatriote et...
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Théâtre Le chant de l'humanité La nouvelle pièce de Laurent Gaudé est dédiée « A toutes celles et ceux qui ne se résolvent pas à ce que la vie soit si courte ». Laurent Gaudé nous livre une belle pièce chorale à partir d’une situation posée, qui résonne singulièrement à notre époque de réchauffement climatique et de guerres : que se passerait-il si une fin du monde proche nous était annoncée ? Le texte s’ouvre sur une succession de monologues : monologue de la première fissure. Monologue du premier bruit. Monologue du temps coupé en deux. Monologue de la danse : « Au petit matin, dans le ciel de...
Égarés, oubliés
par Éric Dussert
Pallu pas lu
Ingénieur dans l’industrie automobile, Jean Pallu avait un rapport ambigu avec les prolétaires. Il sut décrire leur monde : l’usine.
Difficile d’imaginer un pseudonyme plus défavorable : l’ingénieur Petrus Jean Passeneau, né à Izieux dans la Loire le 22 septembre 1898, choisit au moment de publier ses écrits de se nommer Jean… Pallu. On ignore ce qui lui a pris. Jean Pas Lu… on n’entend rien d’autre et c’est étrange. Bref, s’il fallait une preuve que l’ingénieur est plus prévoyant que les autres, c’est raté.
Après avoir publié six romans partir de 1931, Pallu plia son bagage après 1936 et disparut des étals de la librairie. On entendit plus parler de lui. Panne d’inspiration ? Désintérêt de ses lecteurs ?...
Le Matricule des Anges n°195