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Paris-Alger
Lmda N°252 Comment partager un même monde ? s’interroge Yasmina Liassine dans un beau premier roman sur l’algérianité. Avant ce superbe et subtil premier roman, Yasmina Liassine a signé deux livres sur les mathématiques voilà quelques années. Dans l’un d’eux, une anthologie parue au Mercure de France, elle présentait des textes de Descartes, Poincaré, Ionesco, Queneau ou encore Roubaud. Avec L’Oiseau des Français, elle serait plutôt en compagnie de Camus, Kateb Yacine ou Mouloud Feraoun ; car la voilà aux...
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Domaine étranger Invitation au Banquet Le Brésilien Bernardo Carvalho questionne notre rapport au monde d’avant et après-Covid. Un pied de nez métaphysique et malicieux. Enfanter aujourd’hui tient du défi, du pari hasardeux sur un avenir nébuleux. N’en déplaise à ce président aussi impérieux qu’impétueux, dont les formules martiales intiment à un réarmement reproductif. La fragilité climatique et environnementale de la planète, les guerres, l’avènement des extrêmes droites et de matamores illibéraux n’augurent rien de bon. Mais qu’en fut-il en période de Covid ? Au Brésil, le virus fit près de 700 000...
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Domaine français Boltanski intime Exercice d’admiration par François Jonquet, doublé d’une satire du microcosme commercial de l’art contemporain. Un grand écart salutaire. Sur la couverture, il est indiqué « roman ». Mais ce livre contient beaucoup de réel. Il est dédié à Annette Messager et Christian Boltanski, et on a tout de suite envie d’aller voir, dans les dernières pages, celles des remerciements, ce que François Jonquet y mentionne : tout ce qui concerne les deux artistes est vrai, validé, autorisé. Où sommes-nous, alors ? Dans cet entre-deux passionnant qui glisse une bonne dose de fiction (le...
Chronique
En grande surface
En grande surface
par Pierre Mondot
I want Ubac
Au mois de novembre dernier, un sénateur issu du centre décomplexé verse en catimini quelques grammes d’ecstasy dans la coupe de champagne d’une amie députée avec l’espoir qu’elle se mélange les chambres. La manœuvre échoue et la dame porte plainte. Afin de justifier le geste de son client, l’avocat propose une circonstance atténuante : la veille des faits, son vieux chat venait de mourir. Presque la réponse d’Agnès à Arnolphe dans L’École des femmes. Pour le même effet : hilarité générale.
Le pays n’est pas prêt à considérer le deuil des animaux de compagnie. Le chien trépasse et la...
Le Matricule des Anges n°250
un auteur
Martin Rueff
Chronique
Traduction
Traduction
Arnaud Bikard *
Le Chevalier Paris et la Princesse Vienne d’Élia Lévita
Rien ne me destinait a priori à traduire un roman de chevalerie, et sans doute encore moins un roman de chevalerie yiddish. Arthur, Charlemagne, le merveilleux, les inimitiés et alliances des familles seigneuriales n’ont pas exercé de charme particulier sur mon enfance. On a bien dû me dire, avant l’âge adulte, que mes grands-parents maternels connaissaient le yiddish (bien que, ne les ayant jamais entendus parler que le français, il m’est arrivé d’en douter) mais cette langue, associée dans mon imaginaire au judaïsme orthodoxe, à la grisaille polonaise, aux disparus de la Seconde Guerre...
Le Matricule des Anges n°248
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Domaine étranger Défaire le temps Roman élastique sur l’enfance et l’oubli, Mon sous-marin jaune de Jón Kalman Stefánsson est un accordéon autobiographique qui s’étire depuis nos jours jusqu’aux années 1970 en Islande. Un jour de l’été 2022, si proche de celui de notre lecture, un narrateur identique à Jón Kalman Stefánsson se retrouve, dans un parc londonien, face à un fantôme de son enfance : Paul McCartney. Et « les vagues du passé » de tomber sur l’écrivain assis et de le ballotter le temps d’un roman entre ce point de départ et les années 1970 en Islande. Le petit garçon a 7 ans lorsqu’il apprend, au détour d’une phrase, que sa mère est morte. Il vit...
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Poésie Chemins d'inconnaissance Entre songe et audace, souvenirs et solitude, une voix se cherche et s’égare. Au plus près de la terre et de l’élémentaire. En poésie, ressentir cet émoi un peu désorientant qui signe l’éclosion d’une voix nouvelle, est rare. C’est pourtant ce qui se passe à la lecture du premier recueil d’Emmanuelle Grandjean, Les Terres sans sommeil, un titre dont le halo de songes et de sortilèges annonce de l’âpre et de l’indompté en même temps qu’il parle au corps sauvage. Articulé en cinq parties – Les brumes, les combes ; Les corps, les plaines ; Les amers, les landes ;...
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Poches Les replis de l'exil Le philosophe Günther Anders éclaire en un court essai écrit en 1962 ce que l’émigration veut dire. Cet essai commence par une impossibilité de dire. À un interlocuteur, imaginaire ou non, qui lui demande de « raconter sa vie », Günther Anders, né en 1902, répond : « Je ne puis me souvenir. Les émigrés en sont incapables. » Et de préciser plus loin que sa vie, comme celle d’autres qui ont dû fuir l’Allemagne nazie puis l’Europe, est justement « irrésistiblement disloquée en plusieurs vies distinctes » oublieuses les unes des autres....
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Théâtre Du palais au peuple Un monologue en forme de chute, imaginé par le fils d’un autocrate. Kouam Tawa est un écrivain camerounais. D’abord poète, venu à la littérature par la poésie. Puis passant de la poésie à l’écriture dramatique parce que, dit-il, « J’ai compris, très tôt, en fréquentant l’unique bibliothèque de la ville où j’habite, que le livre ne sera pas le moyen par lequel j’atteindrai mes compatriotes à qui j’avais envie, très envie, de parler. Je me suis mis à écrire pour le théâtre parce que de ma table de travail, ma...
Égarés, oubliés
par Didier Garcia
No future
Dans une Bucarest en ruine, le Roumain Mircea Cărtărescu (né en 1956) plante un roman labyrinthique, aux accents de fin du monde.
On avait déjà éprouvé ce genre de vertige avec le 2666 de Bolaño, le Tunnel de Gass, le JR de Gaddis, ou encore Le Grand Roman de Ladislav Klíma. Cette impression de ne jamais très bien savoir où l’on est, où l’on va, et de pouvoir perdre pied pour peu que la lecture se fasse un peu moins attentive. Cette certitude, éprouvée page après page, de ne jamais être, en tant que lecteur, dans sa zone de confort. Et de se sentir sans cesse malmené par un texte tentaculaire, à l’intérieur duquel on craint d’être englouti. Avant d’en ressortir les bras ballants. Un peu sonné. Mais aussi épaté.
On...
Le Matricule des Anges n°223